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CULTURE & CIE

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CULTURE CIE & VOUS

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13 février 2008 3 13 /02 /février /2008 11:31

La-r-alisatrice-L-a-Fazer-sur-le-tournage-de-notre-univers-impitoyable.jpgL’intrigue du film se situe à Paris dans le milieu des affaires. Quel plaisir avez-vous pris à filmer toutes ces tours de verre, ces décors gris-bleu froids, ces transparences entre les bureaux qui rythment la vie des personnages ?

Les cabinets d’affaires classiques sont souvent implantés dans de très beaux immeubles anciens. Je n’avais pas envie de filmer ce Paris-là. Je rêvais de modernité, que cela reste assez abstrait, qu’on sache qu’on est à Paris mais qu’il n’y ait pas les platanes, les kiosques, les bouches de métro, les fleuristes. Alice Taglioni est très belle, elle a une peau éclatante et je voulais que ça ressorte sur des lignes géométriques, sur du verre, du métal. Et comme il y a deux mondes dans le film, qu’on passe de l’un à l’autre, je voulais quelque chose de tranché. Je ne souhaitais pas un monde rond, tout en volutes, mais des lignes simples et claires. Quant à la gamme chromatique du film, elle va avec le décor, en accentuant l’effet d’abstraction.

Toutes ces parois vitrées dans les bureaux donnent de la fluidité au récit et permettent davantage de liens entre les personnages. Quelle a été la difficulté en termes de mise en scène ?

univers15.jpg C’était surtout compliqué pour la lumière et Myriam Vinocour, ma chef opératrice, a été constamment confrontée au problème des reflets dans les vitres. En rencontrant des avocats dans leur cabinet, j’ai été frappée par une chose : c’est un monde en mouvement. Quand ils ne sont pas à leur bureau, ils bougent énormément avec les bras chargés de dossiers. Un décor transparent me permettait ce mouvement. Dans un lieu fermé sans baies vitrées, j’aurais filmé des gens assis derrière leur bureau. Je voulais lutter contre ce côté statique.

Les trentenaires sont légion au cinéma. Votre couple est dans cette zone d’âge mais n’est pas confronté aux problèmes d’engagement habituels. Comment expliquer ce choix ?

Je voulais montrer des personnages qui n’ont pas de «défaut moral». Ils n’ont pas de problèmes majeurs, ils n’ont pas eu une enfance particulièrement malheureuse,
ils ont une vie «normale», qui pourrait passer pour banale. Mais ils vont être confrontés à des questions d’ordre éthique. Ce que le monde va leur renvoyer, c’est une épreuve au terme de laquelle ils sauront s’ils étaient «bons ou mauvais». Car tant qu’on n’est pas confronté à une situation où on doit montrer sa vraie nature on ne sait pas qui on est.

18876847_w434_h_q80.jpgPourquoi des trentenaires ?

A un moment on s’est demandé quel était l’âge des personnages. Dans un grand cabinet d’affaires, on n’est pas nommé associé avant une certaine maturité.
Mais je voulais que cette histoire arrive à des gens jeunes. Dans le film, ils ont foi en l’avenir, confiance dans la vie, dans l’amour et dans le monde. Leur «naïveté» fait que cette histoire leur arrive de manière noble. Ils ne sont pas cyniques. Avec des gens plus âgés ça aurait pu devenir sordide.

Les dialogues sont très acides et les situations pimentées. Tout sonne vrai. Y’a-t-il une part d’autobiographie ?

Il y a plein de problèmes évoqués dans le film auxquels j’ai été confrontée. C’est le cas aussi de beaucoup de personnes autour de moi. D’un point de vue plus sociologique, j’appartiens à une génération où les femmes commencent à accéder à des vies professionnelles plus épanouies, plus ambitieuses, qui remettent en question l’équilibre séculaire au sein du couple. J’ai entendu beaucoup de gens s’en plaindre, surtout les hommes !

Le film navigue entre drame social et comédie. C’était difficile de choisir un des deux camps ?

Au fil de mon parcours, j’ai été régulièrement sommée de choisir mon camp. Mais je n’y arrive pas ! Quand j’étais adolescente, je faisais du théâtre au Conservatoire de Genève, je jouais dans des classiques. En parallèle, je faisais du café-théâtre. Un ami m’a raconté qu’un sage juif-polonais disait que : «dans chaque journée il faut pleurer et rire». Pour moi, l’un ne va pas sans l’autre. Je veux rire dans un monde où je sais que je vais mourir.

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Diriez-vous que votre côté féministe s’exprime assez ouvertement dans le film ?

J’appartiens à cette catégorie de femmes qui revendiquent leur féminisme. Cela me fait même rire qu’une femme puisse ne pas l’être. J’ai grandi en Suisse et ce pays a donné aux femmes le droit de vote en 1971. Dans ma vie privée, j’ai un rapport aux hommes assez paisible. À l’écran, mon féminisme est incarné par le personnage que joue Pascale Arbillot. C’est une féministe acharnée. J’adhère à chaque mot qu’elle dit, sauf qu’elle est ridicule. Chaque fois qu’elle ouvre la bouche ça fait rire ! Cette autodérision doit me rassurer.

Votre film fait des clins d’oeil au cinéma anglais. Il mélange le social et le comique décalé. Ça aussi c’est dans vos gènes ?


Comme j’ai grandi à l’étranger, mon biberon c’est la comédie italienne. Il y a aussi Louis de Funès, l’équipe du Splendid... Et Molière ! Après, j’ai commencé à voir des comédies anglo-saxonnes, dont celles de Woody Allen, et je n’ai plus arrêté. J’ai vu tous les épisodes de Seinfeld : ces gens-là sont des génies de la comédie. J’ai une affinité folle avec tout ça.

Quelles ont été vos références puisées dans le cinéma anglo-saxon pour le film ?

18841449_w434_h_q80.jpg À un moment bien précis du tournage, j’ai dit à Alice que son personnage c’était Samantha de « Ma Sorcière bien aimée ». Je fais aussi référence au film « Pile et Face » de Peter Hewitt avec Gwyneth Paltrow sorti en 1998. Je me suis inspirée de la structure du film car je voulais que l’histoire explore deux versions du monde. Il y a également des références à « Madame porte la culotte » ou à « Indiscrétions », deux films de George Cukor. Bien sûr, toutes les comédies du remariage m’ont influencée !

Ce jeu de «pile et face» ou de «va-et-vient» montre soit le meilleur soit le pire de vos deux héros. D’où vient ce choix de construction ?

Je voulais que mes personnages aient le droit d’être typés, mais pas caricaturaux et stéréotypés. Je me suis dit qu’avec une structure où on voit deux mondes qui se contredisent sur certains sujets, on ne me ferait pas le procès de croire sans sourciller à ce que je dis à l’écran. Je ne suis pas dogmatique, et je crois profondément à la relativité des choses.

Votre film offre deux versions d’une même situation, mais il n’y a qu’une seule fin et elle n’est pas ouverte. Pourquoi ?

La fin est plus ouverte qu’on ne le pense. La dernière réplique de Margot c’est «qu’est-ce qu’on fait maintenant ?». Victor ne répond rien : il ne sait pas. Ensuite, ils partent sur un pont. Ce plan est une référence aux « Temps modernes » de Charlie Chaplin. Je ne voulais pas prendre la tête de mes personnages, du spectateur et la mienne, puis tomber dans un puits et mourir noyés dans l’horreur du monde. Je pense qu’il y a une troisième voie dans la vie. Je voulais une fin où on respire.

En tant que femme, de quel côté penche votre coeur : pour la victoire de Margot ou celle de Victor au poste d’avocat associé ?

J’ai essayé en toute bonne foi que mon coeur ne penche pas. Mais malgré moi, je trouve les situations plus amusantes quand c’est Margot qui a le poste. On peut lui mettre de belles robes ! Je crois que c’est François Truffaut qui a dit que : «faire du cinéma c’est faire faire de jolies choses à de jolies femmes». Cela dit, d’un point de vue éthique, les deux mondes sont aussi atroces l’un que l’autre.

univers11.jpgComment avez-vous choisi Alice Taglioni et Jocelyn Quivrin ?

J’ai toujours voulu un couple sympathique, actif et amoureux. Mais je voulais aussi qu’ils soient un peu trop beaux... Même s’il est réaliste dans ses situations, le film est influencé par la science-fiction américaine. Du fait du passage d’un monde à l’autre, c’est comme si les personnages avaient trouvé la porte de deux mondes parallèles. On est dans « Star Trek » ! Ce que j’aime dans la science-fiction américaine, c’est son formalisme. Parmi mes références il y a « Bienvenue à Gattaca » mais aussi « Starship Troopers » : un film où on envoie des gens jeunes et exagérément beaux dans un charnier pour se battre contre une planète qui est elle-même un animal monstrueux contre lequel ils n’ont aucune chance. Et on assiste au gâchis de tous ces destins, de toute cette jeunesse fervente. C’est très impressionnant. Je suis sortie du film en me disant : «il faut qu’on arrête». On retrouve, toutes proportions gardées, cette idée dans « Notre Univers impitoyable » : il faut arrêter !

Sachant qu’ils sont ensemble dans la vie, cela ne leur a pas posé de problème de s’afficher en couple à l’écran ?


Le fait d’être ensemble dans la vie a énormément apporté au film. On n’a pas eu besoin de s’occuper de toute cette intimité du couple. Chaque geste, chaque mot et chaque demi-intonation deviennent merveilleux ! Mais heureusement que « Notre Univers impitoyable » est un film très chaste car je n’aurais pas pu tourner une scène d’amour entre eux du fait qu’ils sont en couple. C’est plus facile avec des acteurs qui ne se connaissent pas.

Le choix de Thierry Lhermitte pour jouer le rôle du patron cynique s’est tout de suite imposé ?


univers4.jpg Lors d’un dîner j’ai parlé du film à un ami. Il m’a dit : « ton personnage, c’est Thierry Lhermitte ». Ça m’a paru évident. Il fallait quelqu’un qui, physiquement, soit en rapport avec ce souci esthétique de la science-fiction et qui soit terriblement sympathique. Thierry est très beau et très charismatique. Le personnage qu’il joue, c’est plus Figaro que Satan. Il est pris dans l’engrenage. Il tombe amoureux d’Alice. On ne peut pas le lui reprocher !

Les personnages joués par Alice Taglioni, Jocelyn Quivrin et Thierry Lhermitte ont droit au même traitement dans le film. Vous n’en abandonnez aucun en cours de scénario. Pourquoi ?

C’est une structure très classique : on pourrait être chez Marivaux. Il y a le chevalier et Sylvia, incarnés par Jocelyn et Alice. Il y a Lisette et Arlequin, incarnés par Pascale Arbillot et Scali Delpeyrat. Et puis il y a la figure tutélaire qui fait penser au roi chez Molière, au père, c’est Thierry Lhermitte. C’est une très vieille matrice qui a inspiré beaucoup de pièces, je me suis mise dans ces rails-là.

Et le choix de Julie Ferrier, la nouvelle valeur montante du cinéma français : c’est un hasard qu’elle vienne comme vous du milieu du théâtre ?

Je lui ai donné le rôle de la secrétaire. Julie a deux choses : elle est hyper sexy et très drôle. Elle peut incarner un personnage populaire. Pour revenir à Marivaux, elle rentre dans le cadre des paysans, Lubin et Spinette. Vous allez penser : «mon Dieu, c’est affreux ce qu’elle dit-là». Mais Julie en a le potentiel. Dans le scénario, Victor couche avec sa secrétaire, pas avec une starlette ! Julie s’est imposée car j’avais vu son spectacle : elle m’avait littéralement scotchée. Elle a une énergie, une présence, une capacité de transformation, une force physique. C’est une danseuse. Et comme en termes de répliques et d’existence, le personnage d’Eléonore est secondaire, j’avais besoin de quelqu’un de très marquant.

Quelle est la morale de l’histoire ? Peut-être qu’il ne faut pas travailler avec son conjoint tout d’abord ?!!

Oui (rires) ! Pourtant j’ai une théorie sur les gens qui travaillent ensemble : ils ont tellement d’intérêts en commun que cela les maintient ensemble très longtemps. Mais franchement je ne me sens pas à l’aise avec l’idée de donner une morale au film...

notre_univers_impitoyable_imagesfilm.jpg"Notre Univers impitoyable" sur CultureCie...

La critique

L'interview
& la bio d'Alice Taglioni

L'interview & la bio de Jocelyn Quivrin

La bio de Thierry Lhermitte

La bio de Léa Fazer

La bio de
Julie Ferrier

A voir aussi sur CultureCie...

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