Le Centre Pompidou, qui fête cette année ses trente ans, rend hommage à Richard Rogers, architecte de son bâtiment avec Renzo Piano. Sur 1150m2, cette rétrospective (bilingue français-anglais) propose une sélection des projets les plus représentatifs du travail de l’agence Richard Rogers, qui rend compte d'une véritable conception du monde et de la société derrière des maquettes et des dessins particulièrement bien agencés. Portrait d'un homme, d'une équipe et d'un art, l'exposition est aussi ludique qu'enrichissante.
L'espace dans le temps...
L’exposition "Richard Rogers + Architectes" présente le travail de Richard Rogers et de ses associés : des premières réalisations effectuées avec Norman Foster et Wendy Foster ainsi qu’avec Su Rogers, au sein de "Team 4" dans les années 1960, aux projets actuels de l’Agence "Rogers Stirk Harbour + Partners". Portrait architectural d'une facette de notre temps, l'exposition est aussi l'histoire d'une vie, d'une équipe et... d'une conception intime de l'architecture et de ses composantes.
Rogers n'est pas n'importe quel architecte: cette rétrospective est l’occasion de revenir sur la conception du Centre Pompidou dans les années 1970. Du bâtiment de la Lloyd’s à Londres au récent Terminal 4 de l’aéroport Barajas de Madrid en passant par la Zip-Up House de 1968 aux projets d’urbanisme de Lu Jia Zui à Shanghai, de nombreux projets sont ainsi abordés au travers de documents d’archives, de maquettes, de dessins, de photographies, de films et de textes spécialement produits pour l’occasion, le tout étant particulièrement convivial et pédagogique.
L’exposition s’ouvre sur une fresque chronologique couvrant un mur de trente mètres qui permet au visiteur de saisir la richesse de plus de quarante ans de réflexion et de création. Chaque projet, réalisé ou non, est illustré d’une photo ou d’un dessin, faisant de ce panorama une véritable clef de lecture. Là, le spectateur est invité à partager la frustration de l'agence quant à certains projets: comme on est déçu que l'espace de congrès culturel espagnol n'ait jamais vu le jour !
Au bout de cette ligne du temps est diffusée une interview filmée de l’architecte et de ses collaborateurs qui présentent leur travail et leurs influences. Au cours de son interview, Rogers évoque les clés de son évolution: incroyable mais vrai, l'architecte a commencé par un projet ruineux et très ambitieux - la maison de ses beaux-parents - puis s'est ensuite concentré sur des matériaux moins chers et plus rapidement réalisables, non seulement à cause de cette expérience mais aussi parce qu'il avoue que ces réalisations lui paraissaient être en grand décalage avec la crise du logement qui sévissait alors à Londres. Il se concentre donc ensuite sur des projets moins élitistes et crée avec sa femme la "Zip up house", une maison industrielle qui casse les codes classiques avec des cubes osés et des couleurs inattendues.
L'espace d'une société...
C'est sans doute dans cette prise de conscience et cette envie de coller à son temps que s'enracine tout le travail à venir de Rogers et de son agence. Car la présentation de cet ensemble conséquent de travaux passés et en cours permet d’illustrer la vision de Richard Rogers sur le rôle central que l’architecture peut jouer dans la constitution et le développement de nos sociétés: l'exposition rend très bien compte des préoccupations centrales de l'architecte, et dessine d'ailleurs une véritable "conception du monde", peut-être présente derrière tout travail d'architecture. L’architecture de Richard Rogers est fortement marquée par l’École anglaise des années 1970 ainsi que par ses origines italiennes, sensiblement perceptibles dans sa conception de la ville. Mais on retrouve dans ses soucis les inquiétudes majeures de notre temps: transparence, développement durable, lisibilité sont des mots qui font écho à tout citoyen du XXème siècle, qu'ils soient en Europe, aux Etats-Unis ou en Asie.
La cinquantaine de projets présentés est donc répartie entre huit thèmes majeurs. Ces îlots urbains évoquent chacun un mot clef dans le vocabulaire architectural: "lisibilité", "transparence", "public", "systèmes", "environnemental", "légèreté", "urbain", "travaux en cours". Les ensembles se distinguent les uns des autres grâce aux couleurs spécifiques des tables présentoirs. Dans chaque groupe, six ou sept projets sont étudiés, à travers des maquettes, des photos, des dessins et des films. Un ou plusieurs projets, particulièrement emblématiques du thème, sont mis en avant. Ainsi, le visiteur découvrira quelques réalisations incontournables de l’architecte à travers le monde, pénétrant cet univers particulier : le siège de la Lloyd’s (Londres), le Centre Pompidou (Paris), la Cour de Justice de Bordeaux, l’Assemblée Nationale du Pays de Galles (Cardiff), le Dôme du Millenium (Londres), un projet d’urbanisme à Shanghai, le Terminal 4 de l’aéroport Barajas (Madrid), le 88 Wood Street (Londres), ou encore l’immeuble Leadenhall (Londres). Ce dernier s’entoure des travaux en cours de l’agence "Rogers Stirk Harbour + Partners", au sein d’une thématique intitulée "Travaux en cours".
L’ensemble intègre une "piazza" où les visiteurs sont invités à s’asseoir afin de découvrir le catalogue de l’exposition et d’autres publications relatives au travail de Richard Rogers, explorer le site internet de l’agence "Rogers Stirk Harbour + Partners", ou encore visionner les films réalisés sur les projets présentés.
La réussite d'une philosophie...
Les relations entre l’environnement urbain et l’intégration sociale fondent la vision de l’architecture de Rogers, et l’exposition témoigne de ces réflexions en mettant particulièrement en avant la problématique du développement durable qui influence son travail depuis le début de sa carrière.
Portrait de l'un des architectes majeurs de notre temps, l'exposition est aussi une biographie très personnelle: à travers elle transpire une vision d'un métier, une conception d'un territoire évidemment mais aussi une conception de la société - société tout court, société "entreprise" aussi. C'est à la fois d'une approche artistique et d'une approche politique qu'il s'agit. Politique car il s'agit d'aménager des espaces publics, politique car il s'agit de diriger une agence et... si Rogers a une politique, il semblerait qu'elle soit particulièrement humaniste, ou paternaliste dans le bon sens du terme: protéger l'environnement, protéger les membres de son équipe, concevoir une entreprise "familiale"... comme on créerait une maison ?
Dans son interview, Rogers évoque ses premières influences: un père scientifique et une mère poète. Cette évidence, selon laquelle l'architecture se situerait parfaitement à mi-chemin entre une approche artistique et une approche mathématique, ressort particulièrement de cette exposition. A ces approches s'ajoute, chez Rogers tout du moins, une approche politique qui fait de l'architecture un art majeur et... le plus beau métier du monde ?
"Je suis heureux qu'une exposition présente le travail que nous avons réalisé, mes associés et moi-même, ces quarante dernières années. Je suis particulièrement excité qu'elle ait lieu au Centre Pompidou dans le cadre de la célébration de son trentième anniversaire. Concevoir et bâtir le Centre Pompidou a été l'une des meilleures expériences de ma carrière", confie Richard Rogers, qui a reçu le Prix Pritzker récompensant l’ensemble de son oeuvre en juin dernier.
L'exposition, qui sera présentée au cours du printemps 2008 au Design Museum de Londres, a de quoi donner aux plus jeunes l'envie de se risquer à ce métier difficile. Portrait d'une vie "comme les autres", faite de concours de circonstances, de victoires et de hasards, de projets réalisés et d'entreprises avortées, l'exposition est surtout l'histoire d'une réussite, la réussite d'une carrière, mais aussi la réussite d'une philosophie, qui n'était pas promise à gagner.
Electra s’ouvre aux projets des designers de la nouvelle génération. Intelligent, élégant, et environnemental.
A quoi sert le design ? Benoîtement, vous aviez cru le quidam qui vous soufflait « c’est comme l’art, ça ne sert à rien ! » Benoîtement toujours, vous pensiez qu’il n’y était question que d’esthétisme et de mode : un moyen comme un autre de se montrer « tendance ». Mais tout cela était avant. Maintenant vous lisez régulièrement Culture et Cie, et votre sens critique s’est furieusement aiguisé.
La fondation EDF se présente comme soucieuse d’encourager « la préservation et la mise en valeur des richesses naturelles, des paysages et de la biodiversité ». En 1990, en plus de cette louable volonté, EDF a même transformé une des anciennes sous-stations électriques du 6ème arrondissement en un lieu d’exposition pour les artistes contemporains qui, à bon escient, ont si souvent utilisé son produit phare. Des artistes majeurs comme James Turrell ou Nicolas Schoeffer y ont notamment été présentés.
Alors que la planète semble suffoquer de la surconsommation d’énergie, l’Espace Electra nous présente aujourd’hui les réponses qu’une trentaine de jeunes designers apportent à ce problème. Orchestrées par Stéphane Villard, designer à la R&D d’EDF et commissaire de l’exposition, les suggestions valent le détour.
L’exposition s’organise en trois séquences. Tout d’abord elle évoque l’expression esthétique de l’électricité depuis 1890 jusqu’à nos jours. On y retrouve ainsi une belle collection d’affiches publicitaires bien rétros à la gloire d’EDF, toute l’évolution des compteurs électriques, et une gamme très fournie d’interrupteurs, de prises de courant, ou beaucoup d’autres éléments très communs, mais en constante évolution depuis plus d’un siècle. En effet les appareillages électriques faisant partie de notre quotidien - même si on a tendance à les oublier - sont de parfaits témoins des différentes époques et modes traversées : leurs formes, couleurs, matériaux, et technicités sont autant d’informations sur les personnes qui les ont conçus et utilisés. Certes vous y retrouverez la multiprise de votre grand-mère, ou l’interrupteur en bakélite du collège de votre enfance (qui n’était déjà plus aux normes de sécurité), mais jamais vous n’auriez réalisé à quel point ceux-ci ont évolué, et comment.
La seconde partie présente les créations de plusieurs designers de la nouvelle génération, plutôt trentenaires, qui nous permettent de prendre conscience de l’énergie. En effet, comment encourager à économiser ce qui n’a pas de corps ? Ces différents objets matérialisent ainsi l’électricité, afin de nous transformer en consommateurs avertis, donc sûrement responsables, et volontairement économes. Parmi ces objets magiques, on compte la rallonge dont le câble lumineux change de couleur selon l’énergie consommée, le poste de radio dont la station se dérègle toute seule lorsque vous consommez trop (autoritaire mais efficace), l’abat jour-fleur (flower-lamp des suédois STATIC) qui s’épanouit par moment de faible consommation, et tout plein d’autres trouvailles. Vous trouverez même un interrupteur qui va vibrer, scintiller, et refusera de fonctionner en même temps que le four, le lave-linge, et l’aspirateur réunis. Toutes ces créations sont également complétées, au sous-sol, par des outils de gestion de l’électricité : des logiciels ou des compteurs personnels permettant au particulier d’analyser et sa consommation et la production qui lui est nécessaire. Combien de centrales nucléaires fonctionnent en ce moment, pour vous permettre de surfer sur le net ?
Enfin, la mezzanine accueille des projets plus ou moins radicaux, pour limiter au maximum la production d’électricité. Véritable réservoir d’idées, ces projets sont parfois utopiques, parfois tout à fait réalisables. Dans ce monde parfait, les cargos seraient tractés par des kite-surfs géants (déjà proposés par la société allemande Skysails) et consommeraient deux fois moins de carburant. Les pylônes haute tension du paysage français seraient équipés d’éoliennes et le réseau produirait sa propre énergie (concept Wind-it des ingénieurs Elioth avec les architectes Encore heureux). Enfin vous rechargeriez votre I-pod et les batteries de votre portable sur les appareils de votre salle de fitness préférée ! Le projet le plus intéressant, même s’il est complexe à mettre en place, serait d’équiper la planète de fibres optiques pour apporter la lumière du soleil, captée sur la partie éclairée du globe, vers la partie où il y fait encore nuit. Certes un projet de très grande ampleur, mais cela permettrait des gains d’énergie au niveau planétaire, et on a déjà passé des câbles sous tous les océans pour les réseaux informatiques…
D’autres créations sont plus modestes et parfaitement au point, comme l’hydrolienne de Vincent Vandenbrouck, turbine de poche qui, placée dans un ruisseau, génèrera la puissance nécessaire à votre portable ou votre réfrigérateur de camping, ou au téléphone satellitaire d’un camp de réfugiés.
Conscient qu’il est nécessaire de se tourner vers des nouvelles sources d’énergies, et une habitude de consommation très différente, cette exposition d’Electra fait à la fois réfléchir sur nos habitudes et notre environnement tout en apportant des alternatives concrètes et efficaces. Alors… Le design sauvera-t-il le monde ?
A noter...
Espace EDF Electra
Du 25 mai au 9 septembre 2007
Du mardi au dimanche, de 12h à 19h (sauf jours fériés)
Entrée libre
6 rue Récamier
75007 Paris
Métro Sèvres-Babylone
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